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Dépucelé sous un poteau d’éclairage

Temps de lecture : 3 minutes

Mis à jour le 24 juin 2021 à 12h25

J’étais le plus jeune de la bande. Ils n’avaient pas l’âge de mon père mais certains me précédaient d’une ou deux années. Je n’avais jamais goûté au fruit défendu tandis qu’eux, ils en faisaient leur plat favori. Si jeunes, ils avaient déjà beaucoup d’expérience en la matière et la façon dont ils se vantaient de leurs exploits rendrait envieux quiconque qui y aurait prêté un peu trop d’attention. À vrai dire, c’était beau à imaginer. Beau à essayer, du coup. Ils pensaient au sexe comme ils pensaient au prochain devoir de littérature qu’ils avaient en classe. Même un peu plus. Alors que moi, j’avais toujours l’esprit tourné vers les mathématiques puisque c’était mon quotidien. Leur mondanité rivalisait avec mon esprit chaste, pur, sans souillure comme dirait ma mère qui est chrétienne.

J’ai toujours pensé que l’attitude vagabonde de mes compagnons ne pouvait influencer mon comportement jusqu’au moment où je commencai à penser exactement comme eux. Nos réflexions furent sur les mêmes sujets et même si j’hésitais encore à passer à l’acte concrètement, tout était déjà acté dans ma tête. Dans mon caleçon aussi. Chaque jour, je me disais que je devais relever ce défi. Et ce fut à cette période que débuta mon supplice. Je n’avais plus aucun contrôle sur mon corps, mes envies, mes désirs et tout n’était que tentation pour moi. Je craignais de ne pas me déshabiller en pleine rue, sous le regard de quelqu’observateur soit-il pour m’assouvir, exorciser ce démon qui rongeait mon intérieur. J’étais possédé, captivé, enlacé par cette soif d’apprécier l’agrément de ce plat érotique, sensuel, exquis comme ils consentaient à le qualifier en ma présence. Je n’étais plus moi-même et mes délires débordants prenaient de plus en plus la place de mes réflexions justes sur les théorèmes de Thalès ou de Pythagore.

Même les entrecuisses les plus fermées suffisaient pour faire grimper le mât de mon bicolore et les soutiens-gorges les plus bien ajustés au monde parvenaient à chatouiller mon membre. Je ne vivais plus. Je rêvais. Je rêvais de mon corps en apposition contre l’être de l’autre sexe où enfin, j’allais devenir un homme. Car, sous-entendaient-ils que le processus qui mène à la virilité ne passe que par cette voie. J’hallucinais. Je ne sentais que du sexe dans mes alentours. Je ne respirais que le corps des femmes. Je ne voyais point en face de moi quelqu’un avec qui je me marierais et aurais des enfants ; je décelais une bouche que je sucerais jusqu’à ce que j’y laisserais des ecchymoses, des bouts de sein que je pétrirais comme de la pâte à modeler au point où ils deviendraient mous. Je ne percevais que cette peau tendre, suave que je parcourrais en prenant soin de ne laisser aucune parcelle sans mon empreinte.

C’est alors qu’un soir que la chance décida de me sourire. Tandis que je revenais d’un full ticket de la bande dufortine « Modèle d’Haïti 1er » en pleine période de rara, les étoiles se sont mises à leurs places afin que je puisse réaliser mon souhait. Tous ces déhanchements de ces femmes rondes et bien bâties finirent par avoir raison de moi. J’étais encore plus proche de frapper le grand coup. Sous un poteau d’éclairage, je perçus une silhouette qui m’était très familière et quand je décidai de m’approcher, je me rendis compte que c’était cette fille de mon quartier sur laquelle j’ai toujours porté mon dévolu. Titubant, je l’approchai et lui fis part de mes intentions qu’elle accueillit à bras ouverts. Je puais encore l’alcool et mélangé à cette folle envie, tout brûlait en moi. La flamme se rallumait de plus belle. Héphaïstos s’en chargeait lui-même. D’un revers de main, elle balaya la dernière gorgée de cette eau de canne à sucre que j’allais porter à ma bouche afin de libérer une place pour ses lèvres qui croquèrent les miennes. Surpris, n’ayant aucune expérience, la tête à l’envers, je me lassai faire jusqu’à ce qu’elle me plaquât contre le poteau électrique et commençât à me sucer de partout. Je n’exagère en rien en précisant cela. Croyez-moi. Aucune maîtrise, avec peu de sang-froid, j’hésitais à prendre la relève tandis qu’elle ne demandait que cela. C’est alors que cette idée de génie me monta à l’esprit quand je la retournai afin qu’elle puisse être à ma place, en opposition devant le poteau, les jambes écartées autour de ma taille. Moi face à elle. Moi face à mon histoire de puceau.

Je ne sus ni quand ni comment mais je me suis retrouvé à réaliser des saccades avec mon membre dur comme le fer comme dans un taudis tandis qu’elle se contentait d’allées et venues en accompagnant son geste à une mélodie joyeuse que je n’entendrais dans aucun chant d’espérance. Mes coups de reins furent d’une brutalité inouïe. Je déversai tout de moi en elle, elle qui feignait vouloir tout de moi. Et quand d’un commun accord nous atteignîmes le paroxysme de nos batifolages, je la laissa tomber sur ses pieds et j’ai dû m’adosser fortement à ce poteau pour ne pas succomber de faiblesse. Ahh l’alcool et le sexe ! Ça fait deux. Non, trois. Surtout quand quelqu’un d’autre s’y mêle.

Wood Guerlin TELLUS

À propos de Wood Guerlin Tellus

Je suis Wood Guerlin TELLUS, étudiant en Sciences de Réhabilitation (Ergothérapie) à l'Université Épiscopale d'Haïti.

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